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Rebondir et se dépasser : le parcours d’Amandine Estival

Peux-tu te présenter, nous raconter comment est née ta passion pour l'athlétisme ?

Je m’appelle Amandine Estival, je suis student-athlete à Tarleton State University, au Texas, depuis maintenant trois ans. Je suis spécialiste du 100 m et du 200 m, et il m’arrive aussi parfois d’apparaître sur le 400 m. J’ai découvert l’athlétisme il y a maintenant huit ans. J’ai commencé l’athlétisme dans un petit club tout près de chez moi, et j’ai tout de suite accroché à l’ambiance et à l’esprit de groupe, notamment grâce au coach et aux méthodes d’entraînement. Ancienne gymnaste, l’athlétisme m’a permis de découvrir de nouvelles disciplines et surtout de renouer avec le côté plaisir et loisir du sport que j’avais perdu au fil des années à la gym.

Tu as connu une période très difficile après ton opération du péroné. Qu’est-ce qui t’a aidée à ne pas baisser les bras ?

Quelque part, je dirais que c’est mon ego. Je fais partie de ces personnes qui se frustrent assez vite quand elles échouent, ce qui peut être vu comme un défaut, mais qui devient presque une qualité dans certaines situations. Abandonner n’a jamais été une option envisageable pour moi. J’ai toujours su que j’allais revenir, peu importe le temps que cela prendrait. Je ne pouvais pas renoncer à courir alors que je n’avais encore rien accompli de véritablement significatif à mes yeux dans ce sport. J’ai aussi été portée par le désir de rendre fiers mes parents, qui ont toujours été d’un soutien indéfectible.

Quand tu repenses à ce que les médecins t’avaient annoncé à l’époque, qu’est-ce que tu ressens aujourd’hui ?

Beaucoup de fierté. Je suis fière d’avoir cru en moi et de ne jamais avoir douté de mes capacités, et plus encore de ma volonté. En tant que sportive, lorsqu’un médecin t’annonce qu’il sera difficile de faire du haut niveau après une opération, c’est toujours un moment difficile, et le doute s’installe facilement. Aujourd’hui, je me sens spéciale, avec cette impression satisfaisante d’avoir pris une revanche, non pas sur quelqu’un ou sur quelque chose, mais sur moi-même. J’ai une histoire assez atypique, et c’est aussi grâce à cela que j’en suis là et que je continue d’avancer.

Qu’est-ce qui t'a conduit jusqu’aux USA ?

Après mon bac, je suis allée à Paris afin de poursuivre mes études. J’ai donc quitté mon club, mes habitudes et ma routine. J’ai dû trouver un moyen de m’entraîner près de mon université, et ça n’a pas toujours été facile. Malheureusement, tous les athlètes ne bénéficient pas d’infrastructures ou d’aménagements adaptés, ce qui peut rendre la pratique très compliquée. D’autant plus que je préparais un double diplôme universitaire et que ma charge de travail académique était conséquente. Pendant cette période universitaire en France, j’ai eu beaucoup de mal à suivre un programme d’entraînement régulier et intense, ce qui m’a vraiment démoralisée. Je pense qu’il était temps pour moi de changer radicalement d’environnement avant de prendre une décision qui aurait pu mettre un terme à ma carrière sportive. L’idée de rejoindre une université aux États-Unis a alors été une opportunité unique pour moi de continuer à apprendre et de m’exprimer sur la piste, dans un tout nouvel environnement qui me permettrait d’être plus épanouie.

Comment as-tu vécu cette année 2025, entre études, compétitions et records personnels ?

Cette année a été riche en bénédictions et en surprises. Honnêtement, je me suis souvent sentie submergée entre mon diplôme en présentiel à TSU, la poursuite de mon double diplôme à distance en France, la recherche d’un master, ainsi que l’entraînement rigoureux et l’enchaînement des compétitions. J’ai eu très peu de temps pour moi, car je jonglais chaque jour entre les examens et une saison sportive qui s’est étendue de janvier à août, sans véritable pause. Malgré tout, c’est l’une des premières fois de ma vie où j’ai su prendre des décisions difficiles, comme renoncer à ma qualification aux Nationaux D1 pour pouvoir me concentrer sur la préparation de mon avenir. Je me suis aussi prouvé à moi-même que j’étais capable de mener plusieurs projets en parallèle, car oui, au-delà de l’athlétisme et des chronos, je suis aussi une jeune femme et une étudiante passionnée, toujours curieuse d’apprendre. Cette année 2025 a été celle où j’ai rempli au mieux mes objectifs. Sur le plan des études, j’ai obtenu mon diplôme américain, validé mon double diplôme en France et été admise dans le master de mon choix. Sur le plan sportif, j’ai beaucoup progressé, réalisé mes meilleurs chronos personnels, déroulé un beau parcours avec mon équipe universitaire et obtenu ma première qualification en équipe de France lors des championnats d’été en Norvège. Je suis reconnaissante et heureuse d’avoir vécu une année aussi intense, pleine de rebondissements et d’émotions. Je l’ai vécue à fond, sans aucun regret, et je l’ai adorée.

Qu’est-ce que ton expérience à TSU t’a le plus apporté, sur le plan humain et sportif ?

Mon expérience américaine a été, jusqu’à présent, ma plus grande leçon de vie. Avec TSU, ça a toujours été une relation d’amour et de haine, car, en tant que Française, le système académique américain ainsi que la mentalité et la culture ont parfois été déstabilisants, voire en contradiction avec mes valeurs. Mais c’est aussi cela qui m’a beaucoup appris, notamment sur le respect, le dépassement de soi et la méritocratie. Sur le plan humain, je pense que je me suis redécouverte. J’ai réappris à me comprendre et surtout à me faire confiance, un changement qui a influé sur mes performances sportives. J’ai compris à quel point l’assurance et la confiance en soi sont essentielles, des qualités qui me manquaient auparavant sur la piste et qui ont fait, cette année, toute la différence. Lorsque s’achèvera ma dernière année sur place en juin 2026, je reviendrai enrichie de cette expérience sportive et culturelle, et j’en garderai, j’en suis certaine, de grands souvenirs et de belles amitiés.

Ta première sélection en Équipe de France, à Bergen, a une résonance particulière. Que représentait ce moment pour toi ?

Ce fut un premier pas et l’accomplissement de tant d’années de travail. Ce qui est le plus important pour moi, avant chaque saison, c’est de prendre du plaisir sur la piste et d’apprécier le moment tout en apprenant et en progressant. J’essaie de me détacher le plus possible du chrono et de me rappeler que les championnats doivent avant tout rester un moment de plaisir. C’est vrai que cette sélection est arrivée comme la conclusion d’une année de travail intensif, et ce n’a été que du bonheur et une grande fierté. Je me souviendrai toute ma vie de cette première occasion d’avoir pu représenter mon pays au sein d’une équipe engagée et dynamique. Et bien évidemment, cela me motive encore plus pour progresser afin de décrocher une nouvelle qualification pour la saison 2026.

Quel message aimerais-tu transmettre à ceux qui doutent ou traversent une période difficile ?

Je leur dirais qu’il est parfois nécessaire, et même bénéfique, de traverser des moments pénibles, car c’est ainsi que l’on se forge un caractère et une personnalité. Évidemment, les doutes et les craintes sont légitimes, mais il faut savoir apprécier la difficulté pour vraiment savourer la réussite. Sortir de sa zone de confort et se confronter à la dureté, c’est ainsi que l’on grandit et que l’on gagne en expérience et en résilience. Quand on veut quelque chose, il faut s’en donner les moyens, et rien n’est impossible tant que l’on n’a pas décidé d’arrêter d’y croire.

Un grand merci à Amandine pour le temps qu’elle nous a consacré.

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